Les élus de Steve Sem-Sandberg

STEVE SEM-SANDBERG

Les élus

EDITIONS 10/18 - PARU EN 2017 - 624 PAGES

En 1941, à Vienne, l’hôpital du Spiegelgrund a été transformé par les nazis en un centre pour enfants handicapés et jeunes délinquants. Jour après jour, Adrian, Hannes et Julius, pensionnaires de la maison de redressement, tentent d’exorciser l’horreur. Dans un époustouflant ballet de voix tour à tour intérieures et extérieures, ils racontent l’enfer qu’ils vivent et la mort qui les guette au pavillon 15, ou l’on extermine les « indésirables ». Un récit d’une incroyable puissance romanesque, lauréat du prix Médicis étranger 2016.

Ma chronique :

Je connais les aspects de la guerre dont on nous parle principalement lors de nos cours d'histoire. Mais je n'avais jamais entendu parler du traitement d'enfants "déficients", par là je n'entends pas les handicapés à proprement dit mais bien des enfants vus comme idiots et/ou avec des malformations. Et j'ai été profondément émue par ce roman qui parlent d'eux. Alors que l'attention de chacun est tournée vers les batailles, les bombardements et l'avancée de l'armée, personne ne se tracasse ni se doute de ce qu'il se passe dans les hôpitaux. Malgré les plaintes de parents, leurs lettres sont classées sans suite. Mais le jeune Adrian que l'on suit va nous parler de son quotidien au sein de cet établissement médical, ce cauchemar qu'il vit de jour en jour. En alternance, nous suivons Anna, une jeune infirmière qui décroche un poste dans le même bâtiment. Le récit ne se cantonne pas uniquement à la période 40-45 mais bien avant, lors de l'enfance d'Adrian, des études d'Anna, ainsi qu'après la libération de l'Autriche aux mains des nazis. Le sujet traité est extrêmement dur, l'atrocité racontée serre le cœur et noue l'estomac... La plume de l'auteur est très complète, raconte les faits dans leur entièreté, avec des mots d'enfants et d'adultes, à travers les yeux de chacun. Il est vrai que, n'étant pas médecin, je n'ai pas toujours compris les termes médicaux expliquant les malformations mais je n'ai pas cherché à les comprendre non plus pour épargner un peu mon petit cœur... Par moment, j'ai également été un peu perdue entre réalité et divagation de la part des jeunes patients (notamment Adrian) qui subissent de lourds traitements médicamenteux. Chaque enfant m'a émue, j'aurai voulu lui tendre mes bras pour le sortir de ce carnage. Les infirmières sont également perdues entre devoir et conscience, elles n'avaient finalement pas perdu toute leur humanité. Je ne regrette en aucun cas d'avoir dévoré ce pavé, car je pense qu'il est important de se rendre compte par quoi l'humanité est passé, que certains progrès médicaux ont été réalisé à l'insu d'enfant qui ne voulait que vivre, qui on été assassiné froidement pour la "recherche" (bonne ou mauvaise chose? Autre débat). La question de la justice a également un rôle important au milieu de cette affaire qui va bien sûr ressortir une fois les affrontements terminés. Qui est coupable et de quoi? Un ouvrage enrichissant, qui ouvre les yeux, qui va plus loin dans cette abominable guerre. Je ne peux que vous inciter à le découvrir, avec un cœur bien accroché, mais qui a dit que la vie était belle et simple? Parfois - souvent - la réalité est plus dure que prévue à affronter... A méditer.